Vous êtes à la tête d’une PME et, soyons francs, vous en avez probablement plein le dos d’entendre parler de ChatGPT à tout bout de champ. D'ailleurs, difficile de passer à côté : on nous promet que l’IA va faire notre boulot, répondre à nos mails et même nous pondre nos contrats. Ça sent l’entourloupe ? Peut-être. Alors, asseyez-vous, prenez un café (ou un chaï avoine, on ne juge personne), et discutons franchement de ce que cela implique vraiment pour vous, votre PME et le monde qui nous entoure.
L’atout charme des grands modèles de langage (LLM) comme ChatGPT, Claude, Perplexity,... c’est évidemment leur simplicité déconcertante. En gros, c’est comme avoir un stagiaire qui fait tout ce que vous lui demandez, sans râler et sans pause cigarette. En quelques secondes, il vous rédige des mails sympas, pond une étude de marché et vous sort même des CGV (conditions générales de vente) à faire pâlir votre avocat.
Une récente étude affirme qu'une PME pourrait gagner jusqu'à 50% du temps consacré à ces tâches barbantes. Impressionnant, non ? Mais attendez, la lune de miel pourrait être courte…
Parce que oui, derrière la facilité, il y a toujours un revers. Plus vous utilisez ces outils, plus ils s'incrustent dans votre quotidien. Résultat : vous devenez rapidement dépendant d'une technologie dont vous ne maîtrisez pas grand-chose. Et là, bonjour les surprises : tarifs qui flambent, données sensibles stockées à l'autre bout du monde et conditions d'utilisation qui changent toutes les trois semaines.
Pire, plus tout le monde utilise les mêmes modèles d’IA, plus on produit les mêmes textes, les mêmes idées… Bref, tout le monde finit par ressembler à tout le monde. (Youhouuuu 👋🏼, on vous voit sur les réseaux sociaux) Et ça, pour votre marque, c'est aussi sexy qu'un séminaire Excel un lundi matin.
Ne l’oublions pas : quasiment toutes les grandes plateformes d’IA viennent tout droit de Californie. Et si l’on adore Netflix, les burgers et Beyoncé, peut-être que confier tout votre marketing, votre stratégie ou vos documents sensibles à des algorithmes made in Silicon Valley, ça mérite réflexion, non ? Surtout dans un monde trumpist !
Qui garantit que les réponses ne sont pas influencées par les biais culturels ou politiques américains ? Dans un monde où les États semblent céder la place aux multinationales, ces questions méritent franchement qu'on s’y arrête deux minutes.
Sans compter que, bientôt, internet pourrait devenir une soupe fade remplie de contenus basiques, générés automatiquement par d’autres contenus automatiques. Un tel phénomène pourrait progressivement réduire notre capacité collective à discerner l’information pertinente de la simple répétition algorithmique. L'esprit critique et la qualité du contenu pourraient alors être les premières victimes de cette automatisation massive. Vous voyez venir l'idiocracy numérique ? Nous aussi.
Une petite requête sur ChatGPT semble totalement inoffensive. Mais derrière ce geste anodin, se cache une immense machine gourmande en énergie, en eau et en ressources précieuses. Pour répondre à l’explosion des besoins numériques, on construit partout des data centers géants, sortes de centrales électriques déguisées en entrepôts ultra-froids. Chaque requête représente environ ~0,8 g CO2-eq. Ce n'est pas énorme… le seul problème, c'est qu’on est vite à 10 millions de requêtes/an dans une organisation connectée. Imaginez la facture environnementale si tout le tissu PME suit la même pente…
Cette expansion rapide n’est pas tenable sur la durée. Certains pays pensent même à racler les fonds marins pour récupérer les précieux métaux nécessaires à ces infrastructures. Voilà où on en est : prêts à mettre en danger l’un des derniers écosystèmes intacts de la planète juste pour pouvoir envoyer nos mails un peu plus vite. Est-ce vraiment ça, le progrès ?
Historiquement, chaque avancée technologique devait nous libérer du temps. On allait travailler moins, profiter plus, enfin vivre ! Pourtant, on constate depuis des décennies que chaque minute gagnée est réinvestie pour produire davantage. On court plus vite, certes, mais après quoi exactement ? La semaine de travail stagne, le stress monte et notre temps libre fond comme neige au soleil.
La question devient évidente : souhaitons-nous vraiment utiliser ces outils pour améliorer notre qualité de vie, ou allons-nous simplement accélérer encore le rythme pour produire toujours plus, sans jamais lever la tête du guidon ?
Pourtant, la PME demeure le maillon le plus agile de l'économie : proche du terrain, capable de capter les signaux faibles et d'oser des bifurcations que les géants redoutent. L'enjeu n'est donc pas de dire « oui » ou « non » à l'IA, mais de préserver le pouvoir de dire « stop » ou « autrement ».
Pour éviter de vous faire manger tout cru par l'IA, voici quelques conseils concrets :
Ces précautions simples vous permettront de profiter intelligemment de l’IA sans tomber dans ses pièges les plus grossiers.
Imaginez un instant une société plus sobre, plus intelligente et réellement humaine. Un monde où la technologie ne sert pas à vendre plus, mais à vivre mieux. Où l'on utilise les ressources précieuses pour répondre aux besoins essentiels plutôt que pour alimenter une consommation frénétique.
Un tel monde privilégierait la créativité humaine, la coopération, l'écoute et la nuance plutôt que la vitesse et la performance à tout prix. Un monde où la décroissance serait une valeur positive, une façon volontaire et collective de repenser notre économie pour la rendre compatible avec les limites de notre planète.
Concrètement, cela signifierait de réduire intelligemment nos volumes de production pour privilégier la qualité, la durabilité et le partage équitable des ressources. Un monde où l’esprit critique serait encouragé, où nous déciderions collectivement et démocratiquement de ce qui est vraiment utile à notre épanouissement personnel et collectif, plutôt que de suivre aveuglément une course technologique dictée par la Silicon Valley.
Cela implique de repenser entièrement notre rapport à l’innovation : moins produire, mais produire mieux. Moins consommer, mais consommer mieux. Une économie où chaque décision technologique ferait l’objet d’un vrai débat citoyen. Franchement, ce monde-là, avouez que ça fait envie, non ?
Alors, avant d’appuyer machinalement sur "envoyer", posez-vous juste une petite question : ce que je vais produire avec cette IA, est-ce que ça améliore vraiment notre vie collective et respecte notre planète, ou est-ce que ça contribue simplement à accélérer une course insensée ?
Et pour finir, soyons honnêtes jusqu’au bout : la vraie question que vous pouvez légitimement vous poser à la fin de cet article, c’est "Est-ce que j'ai bien fait de me faire aider de ChatGPT et Perplexity pour écrire tout ça ?" À vous de juger…
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Nicolas Henry
Co-fondateur de Pulsitive.impact